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Retour26 mars 2025
Mélissa Blouin - mblouin@medialo.ca
Sept anecdotes inusitées sur Marcel Bonin

©Photo Collection Jean Chevrette
1. Une force musculaire hors du commun
Marcel Bonin était reconnu pour sa force légendaire. Déjà à 14 ans, il travaillait 12 heures par jour dans une fonderie afin d’aider sa famille. Adolescent, il portait des canots sur son dos lors des sorties de pêche et pouvait soulever 210 livres d’un seul bras. Il était également capable de plier sans difficulté un clou de six pouces avec sa main.
Vers la fin des années 40, alors que l’homme fort avait environ 17 ans, un cirque ambulant a débarqué à Joliette. C’était un 13 juin et presque toute la ville s’était déplacée pour l’événement. Au cœur de celui-ci, le célèbre boxeur Joe Louis offrait 1000$ à quiconque réussirait à maintenir au sol un ours dégriffé et muselé. La bête faisait près de 8 pieds et pesait plus de 600 livres. Marcel Bonin a fait un pari avec ses amis et a accepté le défi. Même s’il n’a pas réussi, la foule ainsi que Joe Louis ont été impressionnés par la fougue du jeune homme et c’est ainsi qu’il a reçu le surnom de l’Ours de Joliette.
Marcel Bonin est ensuite devenu l’un des joueurs les plus musclés et forts de la Ligue nationale de hockey de son époque. Il ne reculait devant aucun des batailleurs du circuit. Même avec ses compères, il n’était pas toujours conscient de sa force. Son ami Jean Coderre avait d’ailleurs raconté une anecdote survenue au club de golf de Joliette vers l’été 1962. « J’ai eu un échantillon de sa force extraordinaire. J’étais là à le taquiner, lorsqu’il a empoigné le lourd fauteuil sur lequel j’étais assis et m’a soulevé comme une plume, en murmurant en véritable pince-sans-rire: Qu’est-ce que tu disais Jean ? »
Après sa blessure au dos, Marcel Bonin a continué à faire quelques démonstrations de force. À 55 ans, il avait soulevé 275 livres « bench press» à quatre reprises devant Guy Lapointe, Larry Robinson et Chris Nilan qui, eux, étaient incapables d’en faire autant.
À noter que l’histoire de l’ours détient plusieurs versions et que certains éléments diffèrent, comme l’âge de Marcel Bonin et les dimensions de l’ours. Il s’agit donc d’un approximatif.
2. Les gants du Rocket
Parmi tous les joueurs que Marcel Bonin a affrontés en combat pendant ses années dans la Ligue nationale, se trouve Maurice Richard. Dans une partie entre les Red Wings de Détroit et les Canadiens de Montréal, le 19 février 1953, ils se sont échangé quelques coups de poing. Richard avait même donné un coup à Bonin alors que ce dernier était au banc des pénalités. À l’époque, le Joliettain avait déclaré en entrevue qu’il aimait mieux se battre contre un ours que d’essayer de contrôler le Rocket.

©Photo Collection Jean Chevrette
Marcel Bonin est accompagné de son fils Michel et de Maurice Richard.
Les deux joueurs, qui sont ensuite devenus des coéquipiers, ont développé une belle complicité. Marcel Bonin avait d’ailleurs, chez lui, un petit bar portatif qui lui avait été offert en cadeau par Maurice Richard.
Puis, lors des séries éliminatoires de 1958-1959, le Rocket s’était blessé et avait seulement pu jouer quatre parties. Marcel Bonin lui avait donc emprunté ses gants pour le reste des séries. Il a inscrit 10 buts et 5 aides en 11 matchs en portant ces gants. Il a même joué les héros en marquant le but gagnant qui a donné la Coupe Stanley au Canadien. « Avoir su, je lui aurais aussi emprunté son jack-strap », avait-il dit à la blague.
©Photo Collection Jean Chevrette
L'un des cadres qui appartenaient à Marcel Bonin.
3. Des pigeons champions
« J’ai toujours aimé les animaux et je n’ai jamais pu en garder. Maintenant que je vais passer tout mon temps à Joliette, je fais ce que je veux », avait mentionné Marcel Bonin à un journaliste de Parlons sports qui l’avait visité à son domicile de la rue du Précieux-Sang à l’été 1962. Le Joliettain avait d’abord eu des faucons et des grands-ducs et nourrissaient ceux-ci avec des pigeons. Après le décès des oiseaux de proie, il a décidé de se lancer dans l’élevage de pigeons et de devenir colombophile.
Marcel Bonin possédait une cinquantaine de pigeons voyageurs, « c’est mon passe-temps favori ». Il avait alors expliqué que des membres du Club de Joliette, dans lequel tout était régi, se réunissaient afin de faire des courses et de déterminer celui qui détient le pigeon le plus rapide.
« Nous choisissons chacun nos meilleurs, et nous les mettons sur un train ou dans un camion, dans une cage. Nous avertissons un garçon de les libérer à un endroit donné. Chaque pigeon est identifié par un anneau qu’on lui glisse dans la patte. Le pigeon porte également une bande de caoutchouc qui sert à enregistrer le temps qu’il a mis pour franchir la distance de retour jusqu’à Joliette. La dernière fois que nous avons organisé cette épreuve, nous avions envoyé les pigeons à Sarnia [en Ontario]. C’est à 500 miles [805 km] d’ici environ. Le propriétaire du pigeon vainqueur reçoit un prix et ça fait de quoi parler pendant un bout de temps dans la ville! »
Certaines races coursaient plus vite que d’autres et Marcel Bonin avait fait venir un petit pigeon de la Belgique qu’il avait accouplé avec une autre championne afin de faire sa propre lignée.
4. Un fanclub influent
Lorsqu’il jouait pour les Red Wings de Détroit, Marcel Bonin pouvait compter parmi ses plus grandes admiratrices nulle autre que Barbara Hoffa, alors âgée de 16 ans. Fille de Jimmy Hoffa, un dirigeant syndicaliste américain très influent et reconnu pour ses liens avec le crime organisé, elle avait exigé que Marcel Bonin puisse effectuer ses déplacements en limousine et son père avait obtempéré! À noter que lors de son arrivée à Détroit, environ deux ans plus tôt, Marcel Bonin ne parlait pas anglais. Au restaurant, il ne mangeait que des œufs, car c’est tout ce qu’il était à l’aise de commander. Il avait mentionné en entrevue, « après trois semaines, écœuré, je m’assoyais à côté d’Alex Delvecchio ou Gordie Howe, je regardais ce qu’ils mangeaient et je faisais signe de m’apporter la même chose ».
Plus tard, lorsqu’il jouait pour le Canadien, Marcel Bonin est devenu le joueur préféré de Frank Cotroni, frère de Vincent Cotroni. Notons que le Clan Cotroni était, à cette époque, l’une des familles les plus puissantes de la criminalité organisée à Montréal. Frank Cotroni admirait Marcel Bonin parce qu’il avait du cœur au ventre et qu’il ne craignait pas les adversaires plus gros que lui. Il l’aimait tellement qu’il lui avait organisé une fête et lui avait donné une bague comme cadeau personnel.

©Photo Collection Jean Chevrette
Marcel Bonin ne craignait pas les adversaires.

©Photo Collection Jean Chevrette
5. « Tout un numéro! »
Marcel Bonin semblait prêt à tout pour impressionner la galerie et faire sourire ses coéquipiers. Il était entre autres connu pour sa capacité étonnante à mâcher du verre. « J’avais vu quelqu’un faire et ça m’a tenté d’essayer. On dirait que le verre fond dans la bouche et devient comme du sable. J’aurais certainement pu l’avaler, mais je m’en gardais. » Lors d’une entrevue avec l’Agence QMI en 2009, Jean Béliveau avait aussi mentionné que Marcel Bonin, lors des rencontres d’équipe le matin, faisait souvent le tour du vestiaire en marchant sur les mains, « tout un numéro ce Marcel! » De plus, il était reconnu pour être un grand farceur et pour faire de nombreuses blagues à ses amis et coéquipiers. Il est raconté qu’il détenait notamment une petite boîte à images, dont il fallait tourner une manivelle pour que les illustrations défilent, et qu’il s’amusait à la montrer à tous. Il s’agissait toutefois d’une attrape et lorsque les gens faisaient tourner la manivelle, ils finissaient par recevoir un jet d’eau!
6. Pêche sous-marine et radio amateur
Marcel Bonin était un grand adepte de golf, mais il a dû cesser de pratiquer ce loisir pendant un certain temps en raison de sa blessure au dos. Toutefois, le Joliettain ne manquait pas d’idées pour se trouver de nouveaux passe-temps! Il aimait notamment faire de la pêche sous-marine. Il possédait tout l’équipement nécessaire et éprouvait beaucoup de plaisir à consacrer du temps à cette nouvelle passion qu’il a entamée, selon les journaux de l’époque, vers 1964. Marcel Bonin a aussi eu, pendant une courte période, un intérêt marqué pour la radio amateur. Sa fille Manon Bonin nous a raconté des souvenirs à ce sujet. « Il s’était fait donner cela! Nous l’avions installée dans le sous-sol et mis une grosse antenne sur le toit de la maison. Quand on jouait avec la radio ou quand il parlait avec, tout le voisinage ne pouvait plus capter de postes de télévision ou de radio! Moi, j’aimais bien jouer avec les pitons, donc ça a probablement causé certains inconvénients! Nous ne l’avons pas eue bien longtemps! »

©Photo Collection Jean Chevrette

©Photo Collection Jean Chevrette
7. Marcel Hector Bonin
Lorsqu’il évoluait pour les Red Wings de Détroit, Marcel Bonin était appelé par le prénom de son parrain, Hector. C’est Ivan Johnson, l’entraîneur adjoint de l’équipe à cette époque, qui l’avait surnommé ainsi afin d’éviter la confusion entre Marcel Bonin et Marcel Pronovost. « Lorsqu’il appelait Marcel, je sautais toujours sur la patinoire en même temps que Pronovost », avait expliqué Marcel Bonin au journaliste Robert Desjardins. Ce surnom ne l’a pas suivi après son départ de la formation détroitienne et peu de gens savent que ses coéquipiers le nommaient de la sorte.
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