Agriculture
Retour15 mars 2023
Mélissa Blouin - mblouin@medialo.ca
Le troupeau laitier de la ferme Karibel se classe premier au Canada
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©(Photo L'Action- Mélissa Blouin)
Jacinthe Breault, Luc Lasalle et leur fille Isabelle.
La ferme Karibel de Saint-Paul a terminé au premier rang des troupeaux laitiers les mieux gérés à travers tout le pays. En effet, parmi les quelque 6000 troupeaux canadiens, l’entreprise lanaudoise a obtenu le meilleur pointage, selon l’Indice de performance du troupeau (IPT) de Lactanet, soit 976 points sur 1000.
« C’est une très grande fierté de voir notre entreprise se démarquer! Ça prouve que quand tu y mets de l’énergie, tu peux bien vivre d’une petite ferme familiale et que ce n’est pas nécessaire de devenir gros pour réussir et avoir une belle qualité de vie », a commenté Luc Lasalle, qui est propriétaire de l’entreprise avec sa femme Jacinthe Breault et leur fille Isabelle Lasalle.
Pour ces derniers, qui se sont toujours concentrés sur l’évolution de leur entreprise sans se comparer aux autres, l’obtention de ces distinctions représentait une grande surprise. « On ne cherche pas à être reconnus, nos décisions, on les prend pour notre bien-être et pour celui de nos bêtes, alors quand ça nous tombe dessus, c’est encore plus surprenant », a commenté Isabelle qui est responsable du troupeau à la ferme.
Cette dernière était seule chez elle, avec sa fille de 4 ans, lorsque le palmarès des 25 meilleurs troupeaux canadiens, selon l’IPT, a été diffusé le 21 février dernier. À noter que l’IPT est un système de pointage qui permet de comparer les performances des troupeaux laitiers entre eux en fonction de six critères de gestion, soit la valeur du lait, la santé du pis, l’âge au premier vêlage, l’efficacité du troupeau, la longévité et l’intervalle de vêlage.
Il s’agit donc d’une évaluation de la qualité du lait et de la façon dont l’entreprise est gérée. La ferme Karibel était arrivée en 18e position il y a deux ans et en 17e position l’année dernière. « Je me disais que si j’arrivais 16e cette année, je serais ultra heureuse et que si je n’étais pas dans le palmarès ce n’était pas plus grave, car mon but est d’améliorer mon entreprise, je ne vise jamais un rang quelconque », a ajouté Isabelle.
©(Photo L'Action- Mélissa Blouin)
En regardant la vidéo, elle voyait les positions défiler et se disait que sa ferme ne devait finalement pas faire partie du palmarès cette année. Jusqu’à ce qu’elle voie sa photo en première position. « On dirait que je ne savais pas comment réagir! En premier, je trouvais cela irréel et ensuite je suis devenue émotive! Même aujourd’hui, on ne réalise pas encore que c’est à travers tout le pays et toute l’ampleur que ça a!»
Isabelle était fière d’avoir remporté ce prix en tant que relève féminine d’une petite entreprise robotisée, mais aussi parce qu’elle a réalisé cet exploit de façon éthique et sans jamais manquer de respect à son troupeau.
Prix de la relève Sollio
À peine s’était-elle remise de ses émotions, la famille Lasalle se rendait à Québec, deux jours plus tard, pour le prestigieux gala de Sollio Groupe Coopératif. Les propriétaires étaient finalistes dans la catégorie Relève- Transfert de ferme et ont finalement été nommés grands gagnants. «Ce qu’on a vécu au cours de cette semaine-là avec les deux prix, c’est juste exceptionnel, c’est une grande réussite», a commenté Jacinthe Breault lors de la visite de L’Action.
Ces deux prix ont forcé les propriétaires à prendre un peu de recul et ils ont constaté tout le travail et la progression qu’ils avaient effectués au cours des dernières années. « On faisait notre routine, sans se rendre compte qu'on était rendu à ce niveau! Ça nous a fait réaliser à quel point ça allait bien! Et comme on ne sait pas ce que l'année suivante nous réserve, on veut juste vraiment profiter de ce qui nous arrive! »
Les propriétaires associent ce succès au bon travail d’équipe qu’ils réalisent tous les trois. Isabelle s’occupe du côté animal, son père de l’aspect végétal et sa mère de la comptabilité. « Nous avons tous les mêmes valeurs, mais des compétences très complémentaires. On se partage les tâches et on s’aide, mais nous avons nos domaines respectifs. Cela divise la charge de travail et fait en sorte que nous avons plus de temps pour nous consacrer, chacun, à nos dossiers. »
Ils ajoutent que la réussite se trouve aussi dans les détails et dans le fait d’être proactifs. Isabelle passe d’ailleurs beaucoup de temps à observer la santé et la production de ses vaches. « Dès qu’il y a un petit quelque chose qui cloche, on le règle tout de suite! Comme cela, ça n’a pas le temps de devenir un problème! »
Ils investissent un peu tous les ans pour améliorer leur ferme et cette année, ils feront l’acquisition de barres dorsales qui permettent notamment aux vaches d’être moins sales et de se coucher sans se blesser. Ils veulent également ajouter davantage de ventilateurs puisque les étés deviennent de plus en plus chauds.
Mme Breault a ajouté que le confort des animaux et la propreté de l’environnement sont aussi des priorités. « On lave les bassins d’eau deux fois par jour et aussitôt qu’on voit une vache qui boite on fait venir quelqu’un. Ce sont des bêtes qui s’apprivoisent, on leur fait bien attention! »
Isabelle a d’ailleurs mentionné que la partie la plus difficile de son travail est de faire face à la maladie. « Tu te sens tellement impuissante et tu n’es pas capable de penser à autre chose qu’à l’état de santé de l’animal. On s’attache beaucoup, surtout que mon troupeau est petit [environ 50 vaches], alors je les connais encore mieux et je les vois évoluer. »
©(Photo L'Action- Mélissa Blouin)
Le confort et la santé des vaches sont au cœur des priorités pour les propriétaires de la ferme Karibel.
Historique
Isabelle est la septième génération de la ferme familiale. C’est toutefois en 1966 que le père de Luc Lasalle a décidé de se spécialiser dans l’industrie du lait. Il a débuté avec une quinzaine de vaches et c’est lorsque son fils avait 17 ans qu’il a commencé à travailler à temps plein avec lui. « Plus ça allait, plus on agrandissait. Puis, nous nous sommes associés et c’est en 1989 que j’ai acheté la ferme avec ma femme», a expliqué Luc Lasalle.
Jacinthe Breault qui était, quant à elle, infirmière de profession, allait aider à faire le train chaque fois qu’elle revenait de travailler, « quand on aime ce que l’on fait, on ne compte pas le temps! »
De son côté, Isabelle a développé, dès son jeune âge, une grande curiosité pour l’entreprise familiale. « Je ne voulais pas jouer dans la maison, ce qui m’intéressait c’était de suivre mon père et plus je vieillissais, plus je prenais plaisir à l’aider et à essayer de diminuer sa charge de travail! Même si ça ne me tentait pas parfois de me lever le matin, j’avais un sentiment d’appartenance tellement fort que ça me donnait l’énergie de le faire. Pour moi, c’était juste naturel d'aider! »
Lorsqu’elle avait environ 15 ans, son père a eu un accident de motoneige et ce dernier a dû prendre une décision importante. « Nous nous sommes demandé si on vendait les vaches, mais Isabelle a démontré son intérêt à prendre la relève. »
L’horaire l’a légèrement fait douter, mais elle a décidé d’aller de l’avant. D’autant plus qu’elle sentait la pleine confiance de ses parents. «Ils ne m’ont mis aucune pression et peu importe ce que j’aurais fait, ils auraient été fiers de moi. En ayant des parents comme ça, ça aide à passer par-dessus n’importe quelle crainte! »
Isabelle a terminé sa technique agricole en 2008 et a commencé à travailler à temps plein en 2013, c’est à ce moment qu’elle a obtenu 50% des parts et qu’elle a pris le lead du troupeau. À travers le transfert, les propriétaires ont aussi eu la pleine collaboration de la sœur d’Isabelle, Karine. « Ça s’est fait sans difficulté, on allait tous dans la même direction! »
En 2013, la famille a également procédé à l’installation du robot de traite et elle a ensuite effectué plusieurs rénovations. Au cours des dix dernières années, la ferme est passée d’un quota de 45kg/jour à 75kg/jour avec le même nombre de bêtes, ce qui démontre bien son impressionnante progression.
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