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Retour07 septembre 2022
Jason Joly - jjoly@medialo.ca
Sensibiliser à la consommation sans tabous et sans jugements
« Le PAVO travaille à briser la stigmatisation »
©Jason Joly - L'Action
Karine Tremblay, travailleuse de rue pour l’AJRJ; Christine; Maryline, paire-aidante du PAVO; Maggie; Yanka; Francis; Fayçal Bouafia et Jo.
Au cours de la Journée internationale de sensibilisation aux surdoses le 31 août, les pairs-aidants, accompagnés de l’agent de liaison du PAVO, Fayçal Bouafia, ont visité les organismes de Joliette pour les informer des divers services offerts en lien avec la consommation. Ayant eux-mêmes été confrontés à cette problématique, les membres du groupe en ont également profité pour faire part de leur expérience personnelle afin de montrer aux consommateurs qu’ils peuvent s’en sortir.
«J’ai arrêté toute consommation de drogues au mois de mai cette année. Ç’a été difficile, mais je l’ai fait pour mon mieux-être », raconte Christine. Celle-ci a décidé de contribuer à l’effort du projet PAVO puisque son conjoint a aussi été touché par la toxicomanie. « Dans les dernières années, il a fait six surdoses. Donc je lui ai sauvé la vie six fois. »
Ils ont souvent demandé l’aide des divers organismes, dont le PAVO, qui est une initiative de l’Association pour les jeunes de la rue de Joliette (AJRJ). Il consiste à donner des formations pour expliquer comment soutenir une personne toxicomane ou en surdose et comment administrer efficacement la Naloxone. Des trousses sont distribuées gratuitement aux organismes communautaires, tout comme des seringues et des pipes stérilisées pour les consommateurs.
Les services du PAVO sont offerts par un groupe de personnes ayant été en contact de près ou de loin avec la consommation de drogues. Celles-ci agissent en tant que pairs-aidants pour donner les formations aux organismes et aux commerçants ou pour répondre aux questions des nouveaux usagers. Pour Fayçal Bouafia, qui agit en tant qu’agent de liaison, les services du groupe sont nécessaires : « Joliette est une ville où il y a beaucoup de consommateurs et de surdoses. Les pairs-aidants sont les vitrines du PAVO puisqu’ils peuvent faire part de leur expérience personnelle ».
Cette journée a été l’occasion pour les formateurs de se rencontrer pour la première fois. Au cours de leur marathon des organismes, ils ont pu visiter, entre autres, Hébergement d’urgence Lanaudière, Propulsion, Unité point de départ et l’Orignal tatoué. Le groupe tente d’informer le plus de personnes possible, autant auprès des organismes que des commerçants et de leurs employés qui peuvent faire face à une personne en surdose. « On a pris une autre route en se disant que tout le monde peut avoir affaire à ça et donc, on veut taper à toutes les portes », mentionne M. Bouafia.
De plus, cette journée de sensibilisation a permis aux membres de se connaitre puisque, tour à tour, ils ont été invités à raconter leur histoire pour sensibiliser les bénéficiaires des différents organismes.
« La dépendance n’a pas de visage »
« J’ai tout le temps aimé aider les gens. Alors de le faire pour cet organisme de soutien à la consommation, ça donne un sens à ma vie, confie Yanka, qui en était à sa première expérience. C’était une journée très agréable! »
Ses collègues se joignent à elle pour dire qu’ils ont aussi aimé leur journée en plus de travailler en équipe et de mettre leurs bagages et leurs savoirs en commun. Pour Francis, il s’agissait également de sa première participation à la journée de sensibilisation. Il s’est d’ailleurs dit très touché de ce moment : « En allant à l’Orignal tatoué, j’ai vu la photo de l’une de mes amies qui est morte il y a environ trois ans. De plus, ma conjointe est décédée d’une surdose et j’ai fait des psychoses toxiques dans le passé, donc je suis bien placé pour comprendre quelqu’un qui vit une difficulté et qui a besoin d’en parler. » Les pairs-aidants interviennent habituellement de façon individuelle pour sensibiliser les gens, mais, comme ses camarades, Francis prend le temps de se promener dans le centre-ville et de parler aux personnes qui le souhaitent. « À Joliette, il y a beaucoup de gens qui ont besoin de nos services », reconnait-il.
En montrant le slogan « La dépendance n’a pas de visage » derrière son chandail du PAVO, Maggie reconnait qu’elle-même est toxicomane. Elle apprécie ces formations et cette sensibilisation qui lui permettent d’être en contact avec d’autres personnes dans la même situation et de se reconnaitre en elles. « À l’un des endroits où nous sommes allées, il y a un jeune qui parlait de sa vie et de sa consommation, mais il parlait tout le temps! Nous avons eu de la misère à l’arrêter, mais je me suis vue là-dedans », rit la paire-aidante.
Questionné à savoir s’il était difficile pour lui d’être en contact avec des personnes se trouvant dans une situation qu’il a connue jadis, Jo répond que ce n’est pas le cas. Il ajoute même que c’est ce qui lui a permis d’arrêter de consommer : « Je me suis rendu compte qu’il y a vraiment un changement dans la qualité des drogues et dans ce qui peut se retrouver à l’intérieur, alors ça m’a sensibilisé encore plus. »
Ainsi, pour les pairs-aidants, le PAVO n’est pas qu’un lieu de formation et d’aide auprès des personnes dans le besoin. « Il y a des trousses, mais c’est aussi un lieu qui permet de parler sans tabou, sans se faire juger », explique Yanka. L’agent de liaison, Fayçal Bouafia, approuve cet avis en remarquant que plusieurs personnes jugent trop rapidement les consommateurs de drogues sans prendre le temps de leur parler : « Le PAVO travaille donc au quotidien pour briser la stigmatisation. »
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