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Retour26 juin 2020
Élise Brouillette - ebrouillette@medialo.ca
Le rapport du BAPE est maintenant public
Projet minier Matawinie à Saint-Michel-des-Saints
©Photo archives - L'Action
À la demande du ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC), Benoit Charette, le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) a rendu public le 26 juin son rapport d'enquête et d'audience publique sur le Projet minier Matawinie à Saint-Michel-des-Saints par Noveau Monde Graphite (NMG).
Dans son rapport, la commission d’enquête mentionne que le projet constituerait, pour la sous-région de la Haute-Matawinie, un projet important pour sa croissance et sa diversification économique. La commission constate aussi que la demande projetée pour le graphite est en forte croissance et la rentabilité prévue par l’initiateur élevée.
Dans la conclusion de son rapport en bref, la commission d’enquête mentionne que si elle devait trouver le thème qui a constitué la trame de fond de l’ensemble de ce mandat, ce serait sans aucun doute la conciliation des usages.
« La commission reconnaît la complexité d’intégrer ce projet dans un milieu habité et de villégiature. Elle note aussi les innovations environnementales proposées par Nouveau Monde Graphite en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la gestion des rejets miniers. Soulignons également les mesures d’accommodement pour le milieu humain, dont le programme d’intégration au territoire, les ententes de partage de bénéfices, le plan d’acquisition volontaire et l’horaire de travail adapté. »
Néanmoins, la commission estime que des bonifications sont nécessaires avant que le projet ne puisse être autorisé. Elle ajoute que les évaluations qu’elle recommande dans son rapport devraient être réalisées afin de réduire les incertitudes du projet quant aux composantes valorisées par le milieu, notamment la qualité de l’eau, la qualité de vie, la cohabitation, la valeur des propriétés et l’héritage minier.
« À partir des résultats obtenus, des bonifications devraient être apportées par l’initiateur, puis évaluées par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques avant l’autorisation gouvernementale. À la lumière des préoccupations du public sur le projet minier Matawinie et dans la perspective de développement de gisements miniers près de zones habitées ou de villégiature, la commission estime que l’encadrement mérite une adaptation pour assurer une conciliation harmonieuse des usages du territoire. »
La commission d’enquête souligne que malgré les mesures d’atténuation et de compensation proposées, elle constate que le projet minier comportait encore des enjeux d’acceptabilité sociale au moment de l’audience publique. Également, les séances supplémentaires prévues à Manawan n’ont pu être tenues en raison de la pandémie ce qui n’a pas permis à la commission de compléter sa connaissance des préoccupations et des opinions relatives au projet minier Matawinie en Haute-Matawinie. La commission estime que la communauté atikamekw de Manawan devrait être entendue avant la décision gouvernementale.
Pour favoriser une intégration réussie du projet, la commission croit que Nouveau Monde Graphite devrait, en collaboration avec les instances de la Haute-Matawinie, prévoir un plan d’action pour les responsabilités partagées incluant les mesures nécessaires, l’échéancier, les ressources financières associées et les indicateurs de suivi.
Quelques recommandations
Parmi les recommandations de la commission d’enquête, on retrouve notamment le fait que la demande d’autorisation de Nouveau Monde Graphite devrait inclure une évaluation des impacts associés à un scénario sans véhicules lourds électriques et ce, étant donné qu’une incertitude persiste quant à la possibilité d’atteindre l’objectif d’une exploitation 100 % électrique à la sixième année d’exploitation.
Concernant la qualité des eaux de surface et souterraines, la commission d’enquête souligne que la concentration en métaux dissous dans le milieu récepteur respecterait les critères de qualité de l’eau du ministère de l’Environnement et que les répercussions seraient limitées pour la rivière Matawin et le lac Taureau. Toutefois, l’absence des résultats des essais des cellules expérimentales n’a pas permis au public et à la commission de se forger une opinion sur la performance de la méthode de gestion des rejets miniers retenue pour le projet minier Matawinie, c’est-à-dire celle de la co-disposition. « Le MELCC devrait s’assurer d’avoir les analyses complètes pour valider que cette méthode protégerait à perpétuité la qualité des eaux souterraines », peut-on lire dans le rapport en bref.
À la fermeture de la mine, l’entreprise prévoit remplir partiellement la fosse d’eau. De son côté, la commission est d’avis que le MELCC devrait demander à l’initiateur de considérer le scénario de remblaiement complet de la fosse, et que celui-ci s’appuie sur une vision concertée avec la communauté de l’héritage futur du site minier.
Au niveau des nuisances, la commission d’enquête est d’avis que le Ministère devrait demander une évaluation des répercussions potentielles du projet sur le climat sonore et les émissions atmosphériques en considérant l’utilisation de véhicules pourvus de moteur au diesel, étant donné l’incertitude du virage électrique envisagé.
Également, la commission est d’avis qu’avant la décision du gouvernement sur le projet, l’initiateur devrait, en collaboration avec la Direction de santé publique de Lanaudière, évaluer l’effet cumulatif des nuisances sur la santé et la qualité de vie.
La commission d’enquête recommande qu’un groupe de travail sur le bon voisinage soit mis en place par Nouveau Monde Graphite afin de traiter des nuisances, en incluant des représentants de la Direction régionale de santé publique et du MELCC.
Également, l’étude d’impact manquait de précisions quant à l’enjeu de disponibilité du logement face à la présence de travailleurs occasionnels durant les hautes saisons touristiques dans la municipalité de Saint-Michel-des-Saints. La commission est d’avis que le MELCC devrait demander à l’initiateur qu’il évalue l’état des lieux et propose des mesures d’atténuation.
La commission croit qu’il est important que le MELCC demande une caractérisation de la valeur des propriétés avant le projet et l’utilise comme indicateur de suivi. Advenant une perte de valeur foncière importante, NMG devrait proposer des barèmes de compensations.
Bien qu’une démarche de consultation publique ait été proposée, la commission constate néanmoins que les méthodes d’enquête et les comités consultatifs mis en place n’étaient pas représentatifs du milieu d’accueil, ce qui a eu pour effet de sous-estimer certains enjeux. La commission recommande à NMG d’optimiser la composition du comité de suivi en y ajoutant notamment des résidents habitant à proximité, des représentants du secteur récréotouristique et d’organismes sociocommunautaires ainsi que des personnes-ressources de certaines directions régionales de ministères concernés.
Pour consulter le rapport www.bape.gouv.qc.ca.
Rappel
Le mandat d'enquête et d'audience publique a débuté le 27 janvier dernier et s’est terminé le 12 juin. La commission d'enquête, chargée de l'examen du projet, était présidée par Julie Forget qui était secondée par Jacques Locat, commissaire.
Les séances publiques des deux parties de l’audience publique et de la rencontre préparatoire à l’audience publique se sont tenues à Saint-Michel-des-Saints entre le 24 janvier et le 3 mars. Le rapport contient une description détaillée du projet, un recensement des préoccupations exprimées par les participants lors des séances publiques, l'analyse de la commission ainsi que l'ensemble des constats et des avis qu'elle en dégage.
Une fiche « le rapport en bref » est aussi disponible. Il sera possible d’y trouver le contexte du mandat, les principales préoccupations soulevées par le public ainsi que les principaux avis et constats que la commission transmet au ministre à l'issue de son enquête.
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